Carte blanche à... Christian Lapie

2004

L'oeil

A l'occasion de l'exposition de Lausanne du 26 mars au 1er mai 2004, la revue L'oeil consacre dans son numéro d'avril 2004 deux pages à Christian Lapie. Un texte signé Philippe Piguet et la reproduction d'un goudron sur papier.


|Sans titre 2004,<br> goudron sur papier<br>30 x 23 cm<p>&nbsp;</p>

Carte blanche à... Christian Lapie


Instruite par la puissance de forces tant naturelles que mémorables, la démarche de Christian Lapie est en quête de formes archaïques et symboliques. Le choix qu'il a fait de la sculpture après avoir pratiqué de nombreuses années la peinture n'est pas innocent d'un rapport d'altérité au monde que lui a donné à éprouver le pays champenois dont il est natif et qui est lourd d'un passé inscrit puissamment dans son sol. De souche paysanne, originaire d'un petit village ancré au bord de la Vesle, à une quinzaine de kilomètres de Reims, Christian Lapie a très tôt intégré dans son œuvre les concepts de territoire et de mémoire, non cantonnés à une géographie locale mais au contraire portés à une échelle universelle. L'usage de matériaux élémentaires l'a conduit depuis une dizaine d'années à se servir de l'arbre comme figure métaphorique d'un être au monde commun à toutes les sociétés humaines. L'arbre comme signe archétypal d'une présence de nature et d'un fait de culture. L'arbre enfin comme image référentielle d'un enracinement et d'une élévation, du lien entre l'ici-bas et l'au-delà. Sculpteur à part entière, Christian Lapie a fait aussi le choix de réhabiliter une pratique quelque peu laissée pour compte, la taille directe, avec ce qu'il convient évidemment de moyens contemporains, tronçonneuse en tête. Extraites de la masse d'imposants troncs d'arbres, ses figures teintées de noir dressent au ciel leur magistrale stature, isolées ou en réunion, comme autant de sentinelles inattendues, surgies d'on ne sait où, du fond des âges et de la mémoire. Jadis perchées sur des formes schématiques de maisons, aujourd'hui volontiers nanties d'un lot de grosses et rudimentaires boules. De même qu'il en organise toutes sortes d'installations intelligentes du lieu où elles adviennent, de même Christian Lapie donne corps à ses figures en surface de grands papiers, les unes dessinées à l'aide de jus goudronnés, comme ici pour cette carte blanche, les autres gravées à l'eau forte suggérant ainsi leur force de résistance.
Philippe Piguet.

« Christian Lapie », Lausanne (Suisse), Galerie Alice Pauli, 9, rue du Port-Franc, tél. 00 41 21 312 87 62, 26 mars - 1er mai 2004.

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